Elections en Israël
Ceci n'est pas mon premier blog. Ni le deuxième, ni le troisième. J'en compte une petite dizaine sur différents serveurs ; j'en ai des sérieux, des foutraques, certains bien suivis, d'autres vite abandonnés, certains eurent leur petit succès et d'autres passèrent très inaperçus. Rien ne me permet pour l'instant de dire dans quelle catégorie celui-ci se rangera.
Mais si je l'entame aujourd'hui, alors que je n'avais pas posté un seul billet sur un seul de mes blogs depuis de longs mois, c'est parce qu'hier, en Israël, des élections législatives qui enregistrèrent une faible participation ont amené au pouvoir le parti Kadima, oeuvre d'Ariel Sharon, actuellement dirigé par le premier ministre par intérim Ehoud Olmert.
Ehoud Olmert a été clair. Son plan prévoit de renoncer aux colonies de Cisjordanie et de se replier dans des frontières plus étroites que celles du Grand Israël, du rêve sioniste sur lequel il fait une croix. Il prévoit aussi que ces frontières seront fixées unilatéralement si les négociations avec l'autorité palestinienne se révèlent impossibles ; en l'occurrence, tant que le Hamas ne reconnaîtra pas explicitement l'Etat d'Israël en renonçant à la lutte terroriste, les négociations semblent impossibles.
Les colons s'inquiètent en pensant que dans quelques mois, quelques années, à l'image de leurs compatriotes de Gaza l'été dernier, ils vont devoir mettre dans des voitures tout ce qu'ils possèdent, abandonner leurs maisons et quitter leurs villes. Je comprends leur douleur, mais il n'y a pas d'autre solution, et Israël n'a pas d'avenir valable s'il continue à donner l'image d'un occupant, d'un colonisateur.
Les électeurs de droite et d'extrême-droite vont estimer qu'Olmert est un lâche et un traître. Yitzhak Rabin a été assassiné - et Sharon menacé de mort - pour moins que cela.
Les électeurs de gauche sont probablement assez satisfaits. Le parti travailliste d'Amir Peretz a remporté un score honorable et il est probable qu'Olmert fasse appel à lui pour une coalition gouvernementale.
Mais si le premier ministre par intérim met ses projets en application, s'il fixe unilatéralement des frontières définitives, même si c'est à la suite d'une concertation internationale, il suffira que les Palestiniens, avec lesquels Israël refusera probablement de négocier tant que le Hamas sera au pouvoir et ne changera pas sa ligne de conduite, soient exclus de cette concertation pour qu'Israël perde à nouveau la bataille. La bataille des images, des médias et de l'opinion publique internationale. Celle qui se joue depuis 1967 et que Yasser Arafat a complètement remportée.
Comme le retrait de Gaza, l'établissement des frontières, s'il est unilatéral, sera nécessairement critiqué et reproché à Israël. Le retrait des colonies était réclamé depuis des années ; Sharon, dans un ultime retournement, lui qui avait tant fait pour garder les colonies, s'est retiré de Gaza et on lui a jeté à la tête que l'action unilatérale n'était pas valable. Unilatéral ou pas, c'était pourtant un retrait. Qu'en sera-t-il de l'ensemble des frontières du pays ? Le monde reprochera-t-il à Israël d'agir unilatéralement sans se soucier des désirs palestiniens ? Et les Palestiniens, se soucient-ils des désirs israéliens ? Qu'ont-ils fait pour favoriser l'ouverture de négociations ? L'élection du Hamas ne va manifestement pas dans cette voie. Loin s'en faut.
Je suis soulagée, et je suis inquiète. Je suis soulagée de l'affaiblissement du Likoud et de l'arrivée au pouvoir de Kadima ; je suis inquiète parce que la guerre des médias est sérieuse et terrible, et que j'ignore comment Israël se débarrassera de l'image affreusement sombre qui lui colle à la peau.