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Ménille Avénale
13 avril 2006

QG

Je n'avais pas de café attitré. Pas de quartier général, pas de coin de prédilection ni d'endroit où les gens seraient sûrs de me trouver en-dehors de mes heures de travail. Et sans que je sache exactement pourquoi, cela me manquait beaucoup.

Non que je sois une habituée des cafés en général ; entrer quelque part et commander quelque chose, que ce soit seule ou accompagnée, n'est pas une démarche habituelle pour moi. Je n'ai jamais passé beaucoup d'heures dans un café. Et ce n'est pas un endroit où je songerais spontanément à me réfugier en cas de grosse pluie, de coup de blues ou de moment à combler.

En tout cas, pas jusqu'à il y a peu.

Depuis quelque temps, j'y pensais de plus en plus mais de façon tout de même très abstraite, très rêveuse. Il se trouve que j'ai mis un certain temps à comprendre que l'on puisse passer du bon temps dans un café ; un lieu généralement décoré n'importe comment - ou plutôt, soyons précis, pas décoré du tout -, complètement enfumé, où l'on peut boire certains trucs amusants mais rarement ce dont on aurait vraiment envie et où, comble du ridicule, on ne peut pas grignoter de petites choses bien caloriques à n'importe quelle heure.

Finalement, à part fumer une cigarette et éventuellement, si on est seul, lire un peu - autant de choses que l'on peut faire en beaucoup d'autres endroits -, je voyais mal l'intérêt d'y entrer. Même le principe de la terrasse me paraissait douteux ; boire une limonade trop gazeuse au bord d'une rue en manquant à chaque instant d'être heurté par un passant, j'avoue que j'imagine sans problème des situations plus confortables.

Et puis j'ai découvert des cafés qui faisaient aussi un peu salon de thé - en beaucoup moins guindé, gros avantage - et d'autres qui faisaient restaurant. Ou au moins bistrot, avec quelques sandwiches, quelques salades, quelques croque-monsieur, un plat du jour et une petite carte de desserts. Deux usages majeurs : dans les seconds, on peut aller déjeuner ; dans les premiers et parfois même dans les seconds, on peut s'envoyer une gaufre Nutella-chantilly ou une part de tarte aux pralines dès que l'envie nous en prend. Tout de suite, c'est bien plus attirant.

Il se trouve qu'il y a quelques semaines, peut-être quelques mois, j'ai rêvé qu'un lundi après-midi, je n'avais rien d'autre à faire de deux à six heures que d'aller me poser dans un café avec quarante euros en poche - soit dix euros par heure, ce qui est plutôt intéressant - et de lire sans m'arrêter. Découvrant cela au début de l'après-midi, je prévoyais de faire halte dans deux endroits différents ; je les connaissais tous les deux et étant donné que je les visualisais mentalement avec une facilité déconcertante, je pense que j'y avais mes habitudes. Il ne s'est rien passé de plus et le rêve s'est arrêté bien avant que l'après-midi proprement dit ne commence, mais il m'a remplie d'une telle joie et d'un tel enthousiasme qu'au réveil, c'était presque devenu une obsession.

Je n'y ai pas pensé tous les jours depuis, mais l'idée restait vaguement présente. Elle est revenue en force le jour où je suis entrée à midi, un peu par hasard, parce qu'il était tout proche de mon lieu de travail et que je ne l'avais pas encore testé, dans un café absolument idéal. Petit, clair, convivial, rempli d'étudiants, avec une carte tout à fait honnête et des serveuses souriantes. Le genre d'endroit où même la terrasse paraît agréable. Depuis, je ne vais plus déjeuner ailleurs. Je n'y ai pas encore mis les pieds à un autre moment - il se trouve que je ne traîne pas trop dans le coin à mes moments de loisir, c'est un quartier avant tout associé à la semaine et au boulot, mais je sais que je le ferais avec plaisir. D'autant plus que quand le patron commence à te reconnaître, à t'accueillir en souriant et à te tutoyer en prenant la commande, c'est signe de progressive assimilation.

Du coup, je cherche de semblables petites perles dans tous les endroits où je suis souvent, à commencer par le quartier où j'habite. Et, ô miracle, je crois que j'en ai déjà trouvé une ; l'aspect extérieur est parfait, mais le temps m'a manqué jusqu'à maintenant pour y mettre les pieds.

Comme quoi, il suffisait peut-être d'ouvrir les yeux.

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Commentaires
M
Justement, le paradoxe, c'est que je ne raffole pas - loin de là - des salons de thé. Je crois que mon idéal se situe quelque part entre les deux.
P
C'est en vieillissant que j'ai l'impression de comprendre le monde, ainsi le salon de thé restera toujours aux dames, tandis que l'homme s'accrochera encore au café/comptoir. J'ignore pourquoi les femmes préfèrent s'asseoir pour siroter de la flotte chaude, alors que leurs compagnons se sentent à leur aise pour s'en jeter un vite fait derrière la cravate. Mais c'est ainsi, et c'est peut être aussi ce qui nous différencie irrémédiablement !<br /> Découvrez l'actualité en vers et contre tout sur http://poactu.canalblog.com/
Ménille Avénale
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